Créé par la FAI-AR, le réseau européen IN SITU et Réseau Culture 21, ce MOOC s’inscrit dans le projet (UN)COMMON SPACES 2020-2024, co-financé par le programme Europe Créative de l’Union Européenne. Il s’appuie sur le projet de recherche-action “Habiter l’espace public” (2020-2023) mené par Réseau Culture 21, pour offrir une ressource unique aux artistes, producteurs et organisateurs d’événements artistiques.
Gratuit et bilingue (français-anglais), ce cours en ligne aide les créateur·rice·s à intégrer les droits culturels dans leurs démarches artistiques, tout en offrant une grille d’analyse pour repenser les espaces publics à travers leurs dimensions sociales, politiques et symboliques.
Pourquoi ce MOOC ?
Les espaces publics ne sont jamais neutres. Ils sont traversés par des récits, des rapports de force et des usages qui influencent leur appropriation et leur ouverture. Ce MOOC propose d’aborder les enjeux qui façonnent ces lieux :
- Comment cohabiter malgré les conflits d’usage ?
- Quelles dynamiques participatives peut-on engager pour une gouvernance démocratique ?
- Comment raconter ces espaces de manière inclusive et constructive ?
En sensibilisant les artistes et les professionnel·le·s aux dimensions culturelles, sociales et politiques de l’espace public, ce cours aide à bâtir des projets plus riches, conscients des enjeux contemporains et respectueux de la diversité.
La pédagogie du MOOC
Ce MOOC est organisé en 7 chapitres, chacun explorant une thématique clé des droits culturels en espace public. Chaque chapitre inclut :
- Une capsule sonore d’introduction pour poser les bases de la thématique.
- Une leçon en vidéo qui met en lumière les enjeux liés aux droits culturels.
- 2 à 3 récits d’expériences : témoignages concrets d’artistes, chercheurs et opérateurs culturels.
- Des ressources complémentaires pour approfondir vos connaissances.
Ce MOOC se veut une ressource essentielle pour les artistes, programmateurs et organisateurs. Il les accompagne dans l’élaboration de projets artistiques conscients des tensions, des représentations et des enjeux culturels qui façonnent les espaces publics.
En intégrant ces réflexions dans leurs démarches, les participant·e·s enrichiront non seulement leurs créations, mais contribueront aussi à une utilisation des espaces publics plus démocratique, inclusive et respectueuse des droits culturels.
Le programme du MOOC
Cohabitations et conflits d’usage
L’adage « la liberté des un.e.s s’arrête là où commence celle des autres » induit une mise en concurrence des libertés. Cette idée restreint la pensée d’un espace partagé et pose l’interdit et l’obligation en soubassements de la vie commune. L’adage détourné « la liberté des un·e·s commence là où commence celle des autres » pose au contraire l’interdépendance de nos libertés et réaffirme les droits comme principes plutôt que comme exceptions. Plutôt que de chercher à faire cesser les usages avec des intentions de « tranquillité » ou de « sécurité », comment l’acteur public peut-il préférer l’exigence de la démocratie à la neutralisation de l’espace public ? Peu d’espaces permettent aux personnes de se rencontrer et de débattre, si ce n’est lorsque les conflits sont déjà cristallisés. Cohabiter demande de pouvoir se parler, de s’organiser et de questionner ensemble les règles de vie commune.
Commande politique et participation citoyenne
Les élu.e.s appellent de leurs vœux la participation citoyenne. La co-construction de l’action publique est revendiquée : on cherche à « faire » participer les habitant·e·s. Les méthodes mobilisées sont pourtant marquées de contradictions : la participation est souhaitée, mais dans un cadre de « commande ». Les dynamiques auto-organisées manquent de soutien et de légitimité. Peut-on générer la participation citoyenne par la commande politique ? Est-ce le rôle du politique ? Ne s’agit-il pas plutôt d’être à l’écoute et au service des citoyen.ne.s ? Ces processus participatifs n’assignent-ils pas trop souvent les habitant.e.s à une image et un rôle pensés à leur place, au moment où le politique l’aura choisi dans le temps contraint du « projet » ? L’immaturité de la démocratie participative persiste et conduit à une instrumentalisation qui sert surtout à légitimer l’action politique.
Frontières et mobilités
L’espace public est maillé de frontières, physiques et symboliques qui contraignent ou orientent les usages et les interactions. Ces frontières sur lesquelles se fonde souvent l’action publique peuvent être un frein à l’exercice des droits fondamentaux et de la citoyenneté. Elles peuvent générer ou renforcer des conflits, entraver la liberté de circulation ou limiter les possibilités de s’approprier son milieu de vie et d’y développer des sociabilités. Comment l’action publique peut-elle favoriser les manières de voisiner, de créer du commun au-delà des frontières, plutôt que de les renforcer ? Quelles porosités et circulations peut-elle encourager, entre les communautés, entre les espaces publics et privés, entre les paysages ?
Récits, fiction et réalité
Les territoires sont faits d’histoires qui se racontent, ou non. Héritées de longue date ou plus récentes, ces histoires ouvrent les portes de la fiction comme une capacité à dire le réel : elles sont récits. Ces récits rendent visible, permettent de connaître et de reconnaître, racontent des usages et des manières d’habiter. Mais quelles histoires désire-t-on raconter ? Qui est légitime à être auteur·rice de ces récits ? Que produit la fiction sur le réel ? Comment faire entendre une diversité de voix, y compris celles qui se taisent ? Comment entrent-elles en conversation ? Produire ou transmettre des récits sur un lieu et ses habitant·e·s peut avoir des conséquences importantes sur leurs conditions de vie. Ces récits peuvent assigner et entretenir des représentations ou des fantasmes, comme donner un nouveau souffle aux lieux et à leurs habitant·e·s.
Articulation et gouvernance
Les politiques publiques sont interdépendantes mais leur mise en œuvre reste compartimentée. Les espaces publics sont de puissants révélateurs de ces dysfonctionnements structurels et mettent en lumière les besoins d’articulations entre acteur·rice·s. Qui décide de quoi dans l’espace public, de son aménagement à ce qui peut s’y vivre ? À qui appartient-il ? Comment sont travaillés les conflits et dissensus ? Comment droits et responsabilités s’articulent-ils ? Favoriser le croisement et la complémentarité des savoirs, savoir-faire et expertises, dans une démarche de coopération, permettrait de développer des modalités de gouvernance plus démocratiques de ces espaces et de considérer de manière plus systémique l’ensemble des enjeux qui les traversent.
Appropriations licites et illicites
L’appropriation de l’espace public est inégale selon les lieux, les genres, les âges, les heures… S’approprier un lieu, c’est pouvoir s’y sentir chez soi, l’investir par des usages, mais aussi en prendre soin. La légitimité à être acteur·rice des lieux se construit avec ce sentiment d’appartenance.
Les cadres réglementaires sont le plus souvent fondés sur l’idée que l’interdit ou l’obligation garantissent la liberté de tous et toutes. Il faut pourtant parfois oser la transgression pour s’approprier un lieu. Des usages spontanés peuvent rapidement être considérés comme illicites s’ils n’ont pas été validés en amont par l’autorité publique. Certaines formes qui s’expriment dans ces usages sont néanmoins nécessaires pour faire évoluer l’action publique. Comment les reconnaître et les soutenir sans les formater ?
Représentation et rapports de force
L’espace public est le lieu d’une vie collective où se mêlent des personnes qui n’ont pas décidé de vivre ensemble. Il est le théâtre de rapports de force nourris de représentations qui alimentent aussi les dynamiques de régulation de l’action publique. Ces rapports de force induisent des inégalités d’accès et d’usage des espaces entre les personnes, certains modes de vie étant considérés comme moins légitimes au regard de normes sociales et culturelles dominantes qui donnent le ton. Qui dicte la norme ? Comment déconstruire les représentations et les assignations ? Comment favoriser la diversité plutôt que l’uniformisation des modes de vie ? L’espace public est un espace politique où doivent pouvoir s’exprimer et se débattre les références de vie de chacun·e, afin de permettre à tous et toutes d’y prendre place dans le respect des autres.