Kinesthète

Eve
Ganneau

Diplomée du CNSM de Paris en 2006, Eve à d’abord dansé dans des compagnies de répertoire en Allemagne. En 2012 elle rejoint la compagnie du Scottish Dance Theatre en Ecosse où elle a collaboré à des créations de chorégraphes contemporains et commence à développer une pratique de l’enseignement. En 2015 elle s’établit en tant qu’artiste indépendante.

Ses engagements les plus récents en tant qu’interprète comptent une collaboration avec Scottish Ensemble et Andersson Dance (Suède), Goldberg Variations – ternary patterns for insomnia ainsi que le projet de danse-théâtre itinérant avec Scarlattine Teatro (Italie), Meeting The Odyssey. Elle a collaboré pendant 3 ans avec la compagnie Joan Cleville Dance basée en Écosse et travaille régulièrement avec Cafe Fuerte, compagnie autrichienne de théâtre physique in situ.

Parmi ses projets chorégraphiques, la piece Geographical Skin en collaboration avec la musicienne Su Shaw a été présentée au festival Hidden Doors, Edinburgh en 2018. Elle enseigne régulièrement la danse et la méthode Feldenkrais au Royaume Uni et en Europe.

Interstices

Interstices est le Projet Personnel de Création porté par Eve, entre septembre 2022 et juin 2023, dans le cadre de la formation supérieure.
L’interview ci-dessous a été réalisée et retranscrite en juin 2023 par Julie Bordenave.


Comment se rencontrent la danse et l’espace public dans ton parcours ?
Le fait de migrer en tant qu’interprète de la salle vers des espaces non dédiés, assortie d’une pratique sauvage de l’espace public, m’ont donné envie d’aller plus loin. J’ai découvert la beauté de partir à la rencontre d’un lieu et de ses habitant·e·s, d’être poreux·ses à la vie et aux rencontres que permettent les temps longs de présence. Intéressée par l’activation d’un espace et les traces qui en restent, je réfléchis à la manière de transmettre ces échanges. En arrivant à la FAI-AR, j’étais désireuse de mettre au travail une partition chorégraphique, notamment pour des non professionnel·le·s. J’étais portée aussi par l’envie de travailler dans les jardins partagés : des lieux de rencontres, de partage de pratiques et de savoirs, mais aussi de lutte à l’échelle micropolitique.

Comment ta pratique initiale de danseuse nourrit-elle ton projet participatif Interstices ?
Le rapport au corps et au mouvement y est présent. Avec mon équipe pluridisciplinaire – un danseur, une performeuse, une comédienne et un jardinier poète – nous avons été en immersion dans un jardin, en contact avec les usager·ère·s et les gens qui le font vivre, pour ensemble y créer des temps de partage. Nous les avons ensuite formalisées sous la forme d’un jeu de cartes. Ce jeu constitue une interface de rencontre et de participation, imaginé pour être joué dans des jardins partagés, sur une durée d’au moins 1h.

Quel est le but de ce jeu ?
L’idée est d’utiliser, recycler, structurer des matières générées dans les jardins, en les agençant pour créer un système un peu plus complexe. Les cartes visent à impulser des formes de collecte plus ou moins protocolaires, organisées en catégories : les personnages, inspirés de rencontres ; les pratiques et actions ; les chemins, regroupant les atmosphères, ambiances et matières guidant vers un imaginaire ; les conversations, sous forme de moments de rencontre incitant à livrer son rapport au lieu. Par leur action et leur présence, les participant·e·s dessinent une partition chorégraphique. Ils et elles sont appelé·e·s à dessiner un paysage, à la fois par évocation sensible, mais aussi de manière tangible, en jouant sur plusieurs échelles, par déplacements et par micro-actions. Certaines cartes invitent à accumuler, assembler, construire… Peu à peu, une trace est laissée dans le jardin parcouru. À l’avenir, j’aimerais aussi inviter des expert·e·s pour des mini-conférences. Le jardin partagé est une métaphore de création en chantier, et ce jeu agit comme un support de rencontre ; il pose aussi la question de ce qui fait œuvre ou pas. Ce qui m’intéresse vraiment, c’est l’art relationnel, poser un cadre qui crée du lien, du commun.

Présentation vidéo du projet

Interview et captation vidéo réalisées lors des Esquisses, en juin 2023.
Ces Esquisses sont des présentations de maquettes des Projets Personnels de Création menés pendant la formation supérieure de la FAI-AR.